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J'ai reçu il y a quelques temps le mail suivant de Guy S. :
Bonjour,
Je tiens en premier lieu à vous remercier pour votre blog et plus particulièrement pour son contenu et sa densité.
Suite à la lecture (laborieuse) de « Le Nouveau Monde industriel et sociétaire » de Charles Fourier, j’en suis venu à m’intéresser à la redéfinition actualisée ou plus modestement à repenser les rapports de couple, tel qu’il le fit aux alentours de 1820.
De fil en aiguille, j’ai intériorisé la notion de ce que Fourier appelle « le lien pivotal et les liens périphériques du couple »
De là, entré naturellement dans la sphère ou les méandres du « polyamour », je ne pouvais qu’être intrigué par le libertinage. Depuis quelques années, bien que « non pratiquant » me voila observateur extérieur de quelques amis des deux sexes en essayant d’avoir le regard le plus neutre possible (sans jugement moral) pour comprendre les choses.
Je ne revendique nuls savoirs particuliers, nulle découverte ; simplement j’essaye de faire bénéficier mes contemporains de mes modestes réflexion qui pour non pertinentes qu’elles soient, leur apporteront j’espère quelques matières à penser ou du moins un point de vue.
J’ai découvert l’existence de votre blog sur Netéchangisme et vous lire ainsi que quelques réactions m’a conduit au « document » en pièce jointe.
Je termine en vous remerciant une fois encore de votre sincérité et vous encourage à continuer.
Etait joint à ce mail un texte très intéressant que j'ai proposé à Guy S. de faire figurer sur le blog à titre de contribution.
Le voici :
Libertinage ou Libertinages ?
Champ d’analyse :
Compte tenu des déterminismes sociaux qui lui sont attachés, l’homo Occidentalis et devrais‐je dire
plus particulièrement sa compagne ont énormément de mal à se défaire du carcan des préjugés liés
au libertinage.
Avec la conscience de ce que le mot libertinage soulève d’apriori à sa seule lecture il me parait utile
de rappeler que la racine étymologique de ce mot est liberté. Conditionnement sociologique oblige,
peut être devons nous quand on en à une vision négative, admettre, que revendiquée par les autres,
cette liberté fait peur ?
En Occident où la pensée de l’individu est façonnée par 20 siècles de judéo‐christianisme, la sexualité
ne fut comprise que comme procréatrice (croissez et multipliez), la liberté sexuelle des individus fut
tout bonnement niée (Une Femme honnête n’a pas de plaisir) et de plus, jusqu’à hier, y contrevenir
vous exposait à la mise à l’index social et aux futures gémonies post mortem. En raccourcis, accéder
de son vivant au Nirvana par le sexe vous faisait perdre l’accès au jardin d’Eden posthume.
Historiquement par consensus social on à voulu en Occident emmailler fidélité dans le couple et
exclusivité sexuelle. Probablement que même de nos jours, dans l’esprit de monsieur Jourdain, les
deux notions sont indissociables. Ainsi elles peuvent indifféremment être employées, pire
amalgamées. Donc il parait ici bon d’en fixer le champ :
- La fidélité est par définition une vertu éminemment philosophique.
- L’exclusivité sexuelle est en ce qui nous concerne un choix contractuel, donc plus ou moins
libre et / ou contraint.
L’actualité du concept :
En Occident, plus de 40 ans après la libéralisation des moeurs, rien que son évocation sans même en
faire pour autant l’apologie, trouver la moindre vertu au libertinage, vous fait passer pour immature,
et continue de vous imposer les jugements moraux précieusement fourbis depuis des siècles.
Le regard porté sur le libertin sera au mieux égrillard, voir envieux ; celui sur la libertine moralisateur
à défaut d’être concupiscant.
Certes ! Il n’y à plus de pilori sur la place du village et nous sommes plus tolérants vis‐à‐vis de ce que
nos grands parents appelaient « les Femmes de mauvaise vie » Faut’ il aussi ici noter que, hors la
littérature d’obédience religieuse, personne n’entendit jamais parler « d’Homme de mauvaise vie »
Parlant de « Femmes légères » et « de coureur de jupons », les métaphores employées en disent long
sur la classification opérée par le diktat social… La qualité humaine de l’individu se résumant à la
conformité de ses pratiques sexuelle.
Peu à peu les choses ont évolué et si les « célibatants » des deux sexes se sont banalisés sous les
projecteurs sociaux ; les « bonnes âmes pétries de moraline » ont vu émerger avec effroi de
nouveaux rapports qui interpellent leurs bonnes consciences.
Au point d’empêcher certaines et certains de dormir la nuit ? …C’est là une autre histoire !
Voir au paragraphe échangistes, candaulistes, mélangistes, cote‐à cotistes… Bref, il difficile pour les
biens pensants de réaliser qu’il en soit pour trouver leur plaisir en ligues, en groupes et peut être
horreur même bien en processions ! La classification n’est pas que le fait des aficionados et
probablement chacun à « sa paroisse » en la matière.
Voila donc la morale adossée à 20 siècles d’us et de coutumes battue en brèche par des individus qui
revendiquent le droit de jouir sans entraves. Ne nous y trompons pas ! Cette demande d’accès au
libre plaisir est individuellement ET socialement révolutionnaire car elle remet en cause à la fois la
vision et l’institution séculaire que chaque individu se doit d’avoir du couple fut’ il marié ou pas.
Domaine d’emprise :
Un individu, Femme ou Homme en tant que constituant d’un couple à beau se dire libéré, voir
libertin, la pensée rapide de ses contemporains associe sa démarche à l’unique quête du plaisir,
forcément empreint du mensonge et / ou du vice…Il ne peut être exclu dans l’esprit de certains le
plaisir du divertissement … de tromper l'autre. Entendu que cela n’enlève rien à la difficulté de se
tromper soi même vu toutes les incohérences dues au manque de réflexion en profondeur qui nous
poussent à l'acte.
C'est selon ces mêmes individus, acteurs promoteurs d’initiatives ou suiveurs passifs à des degrés
divers, c’est parfois une question de survie, de confort, de lâcheté...En tout cas source de mal être
car hésitation à tout plaquer pour vivre pleinement une sexualité épanouie… Car c’est Là, et nulle
part ailleurs LE noeud du problème : Le libre épanouissement sexuel de l’individu !
Un internaute se posait la question « Est‐ce vraiment cela l'unique moteur d'une vie »? La réponse
est à trouver en chacun mais manifestement ça fait partie d’un tout qu’il semble bien difficile de
résumer.
Existe‐t‐il en la matière une logique autre que paradoxale ? Qui hors toute prétention et de façon
sure et certaine peut prétendre pour les 10, 20, 30 années qui viennent répondre in extenso aux
désirs, attentes, souhaits, fantasmes à venir de son / sa partenaire ?
« Vis et profite de l’instant présent », « Jouissons sans entraves », « Demain est un autre jour »… Les
stances et les maximes qui servent à justifier le plaisir et sa quête ne manquent pas
Il ne peut être fait l’impasse sur les domaines que représentent l’attrait de la transgression, l’intérêt
de nouvelles expériences, ce que certains verront comme « une mise en danger » parfois nécessaire
pour garder vivant de leur couple…
L’empreinte de Dionysos
Difficile pour beaucoup d’admettre que libertiner alors qu’on est en couple n’a à voir qu’avec la
morale et ses arrangements dont chacun veux bien se doter tant qu’elle n’entre pas en collision avec
celle de l’autre. Même et surtout si on n’est pas ou plus en quête d’un idéal à trouver chez le ou la
partenaire d’un soir, voir épisodique, la quête de plaisir sexuel à la marge du couple laisse supposer
selon certains une insatisfaction permanente.
Faut’ il reconnaître que SI l’alchimie sexuelle n’est pas forcément au rendez vous de tous les couples,
dans quelle mesure le sexe peut il être le seul et unique ciment d'une vie a deux ? Ce qui fonde la
pérennité d’un couple est quand même un peu plus subtil et beaucoup plus exigeant que ça. Peut’
on se contenter de se dire que vivre une vie sexuelle riche et épanouie conduit obligatoirement à une
vie de couple radieuse et durable ?
Si nous avons la vision que dans le libertinage, les deux sexes ne bénéficient pas des mêmes
avantages ni des mêmes prérogatives ; peut être devrions nous aller voir du coté de la sphère
homosexuelle pour élargir notre champ de vision psychosociologique ou l’on trouvera les mêmes
formalismes de pensée.
Quoi qu’il en soit, chez les hétérosexuels, il est admis que les Femmes sont dans la position de la
reine des abeilles et dans les réunions de groupe ce sont bien elles les reines de la fête. Faut’ il se
dire que comme dans la vie, Ils proposent et elles disposent ? A contrario, es t’il permit de penser
que « ces cigales » se trouveraient bien démunies si elles n’étaient pas sollicitées…
Jettera‐t‐on pour autant la pierre au philosophe qui dira qu’au vu de la foultitude des sollicitations
« abondance de biens nuit toujours » ? M’appuyant sur l’histoire sociologique, je ne crois pas que s’il
n’avait tenu qu’aux femmes, le libertinage tel que nous le connaissons de nos jours existerait.
Si elles ont su de tous temps trouver selon leur convenance à satisfaire leur libido : je ne résiste pas à
la tentation de dire qu’en ce qui les concerne ; difficile héritage des déterminismes sociaux oblige,
l’adhésion au libertinage reste l’affaire d’une minorité à l’esprit ouvert.
Filtre(s) sélectifs
Peut être faut’ il nantir son regard d’un filtre sociologique pour percevoir en quelques occasions
qu’entre celles qui subissent en trainant les pieds le fait d’être exposées par un conjoint promoteur
de leurs charmes et celles qui ont pris le partis délibéré et conscient de se faire plaisir à travers une
sexualité sans entraves, il existe la foultitude de celles qui ne considèrent que le jeu d’adultes. Ne
pouvant sonder les âmes et les coeurs, difficile de trouver des références ou c’est la dame qui est
demandeuse et le monsieur suiveur. En tous cas sur le plan de l’initiative, la parité ne semble pas
exister, même si beaucoup diront être en harmonie sur le sujet avec leur partenaire.
Comme dans tout jeu il est question de bénéfice primaire. Sont identifiés ici le plaisir et la
reconnaissance fut’ elle du bas ventre, voir la satisfaction intellectuelle. Il ne peut cependant pas être
fait abstraction du ou des bénéfices secondaires, car plus difficilement discernables.
Incontestablement, l’arcane première de ces jeux consiste à donner et à recevoir du plaisir et
s’emmaille alors toute la psychologie liée à l’offrande et la gratitude, au point que chez certains cela
soit élevé au rang d’art de vivre. Nous savons tous qu’il est des individus et des couples dont toute la
vie (vacances comprises) est organisée autour du plaisir sexuel éventuellement partagé avec autrui
voir en groupe. En se gardant d’une généralisation rapide, il n’est pas étrange ici de remarquer que
du point de vu des sources de l’excitation, s’ils sont plus visuels, elles sont plus kinesthésiques.
Peut être initiées par le livre de Pauline Réage « Histoire d’O », les références au lâcher prise, à la
docilité et à la soumission ne sont pas rares Cette façon de penser, pour « actuelle » qu’elle soit,
parait chez beaucoup indépassable et la grande majorité semble s’en satisfaire. Probablement, peu
au fait des arcanes philosophiques, le monde libertin actuel ne trouve pas dans un hédonisme solaire
ni retentissement ni l’occasion de se reconnaître. La vulgate ne retient de l’hédonisme que le plaisir
au sens second « cigarettes whisky et petites pépés »
Pour situer le champ du ou des bénéfice(s) secondaires, il peut être avancé que quand dans la sphère
ludique les jeux sexuels prennent le pas sur tous les autres, le slogan « Jouissons sans entraves »
devient l’arcane d’une vie ou toute autre philosophie n’a pas de place. Les individus dans ce schéma
comportemental ressemblent à ces corps amputés, incapables d’éprouver des émotions et / ou
ressentis autres que sexuels, ils ont besoin du secours de l’autre pour les initier, partager… y accéder.
Le second volet de ces pratiques parait être chez bon nombre (probablement plus chez les Femmes
que chez les Hommes) l’abdication supposée volontaire et temporaire d’une personnalité d’adulte
construit et autonome. Nombre d’individus admettent éprouver énormément de plaisir à être
conduits si ce n’est « chosifiés » lors de ces jeux à caractère sexuels ou le divin marquis n’est jamais
très loin.
Extension du champ du plaisir
Si la jouissance sexuelle, la production d’adrénaline et d’endomorphines restent étroitement liées
elles n’en demeurent pas moins limitées aux stimulis « organiques ». Cas unique dans le vivant sexué,
l’Homme est probablement le seul à trouver dans les méandres de sa cérébralité un surcroit de
plaisirs fut’ il parfois dans la douleur.
Tous ceux qui se sont à un moment ou à un autre intéressés aux arcanes du libertinage ont en
mémoire le livre autobiographique de Catherine Millet « La Vie sexuelle de Catherine M » ou il est
clairement fait état du plaisir que l’auteure éprouve entre autres à être livrée « en pâture à une
horde »
On peut de façon réductrice vouloir s’arrêter à la seule « boulimie sexuelle » et ne pas voir plus loin.
Manifestement il existe au moins dans le cas de Catherine Millet des raisons qui n’émergent pas
spontanément. Dans son cas comme dans celui de beaucoup, l’addiction au plaisir sexuel n’explique
manifestement pas tout.
Si on se réfère au principe psychosociologique qu’il n’existe que deux moteurs principaux qui nous
gouvernent ; ce qui conduit le sujet dans ce cas précis relève t’il de la crainte ou de l’intérêt ?
Intérêt, bénéfice du plaisir (sexuel et / ou intellectuel) ou crainte de décevoir, de déplaire au
partenaire ? S’il est entre autres question de lâcher prise ou du plaisir de la transgression, les deux
registres sont inextricablement emmaillés.
Conclusion
Hors tout intellectualisme excessif, sans la prétention d’une classification à outrance, le sujet du
libertinage en couple me parait souvent être « perturbateur » de l’individu et de ses rapports sociaux
probablement à cause de son coté transgressif.
Il n’est pas contestable que beaucoup d’individus arrivent avec le temps à trouver un point
d’équilibre entre plaisir et « gestion difficile de l’après » N’est pas rare la confidence de libertines
(peut être d’occasion) qui disent après ces « escapades » ou elles furent conduites sans grand
enthousiasme se sentir mieux après une douche et n’y plus penser pour passer à autre chose...
A tous je voudrai rappeler la phrase de Nicolas Chamfort « Jouis et fais jouir, sans faire de mal ni à
toi, ni à personne, voilà je crois, toute la morale »
De là nait peut être la nécessité impérieuse et sans concessions de nous interroger en profondeur sur
la raison qui nous conduit au libertinage.