Il y a quelques temps, je parlais avec Philippe Combessie du pluripartenariat féminin sur lequel il travaille, et notamment des interactions verbales entre les femmes et leurs amants dans ce contexte : qu'est-ce qu'une femme peut / doit dire ou non à ses différents amants, quand le dire, comment le dire, pourquoi dire ceci et non cela... ?

Mon parcours entrant dans le champ de ses recherches, nous avons parlé de cette expérience de bipolarité dans ma vie sexuelle avec ces hommes que je vais appeler "X" et "Y". Je n'ai pas la naïveté de croire que ce subterfuge dans leur désignation empêchera les visiteurs les plus familiers de ce blog de comprendre de qui il s'agit. Mais je souhaite laisser la possibilité à ces hommes de nier qu'il s'agisse d'eux si quelqu'un les interpelle à ce sujet. Façon de préserver leur vie privée que je dévoile déjà suffisamment par ailleurs.

 

Lors de cette conversation avec Philippe Combessie, après quelques questions qui visiblement confortaient les témoignages qu'il avait déjà recueillis, il m'a demandé : "Et le préservatif?" 

J'aurais préféré éviter la question, mais le fait qu'il me la pose impliquait probablement qu'elle était d'une grande banalité dans les configurations de ce type.

 

Au cours de notre relation sentimentale stable, "X" a toujours éludé la question des analyses et de l'arrêt du préservatif. La fréquentation assidue du milieu libertin l'avait rendu extrêmement méfiant et il ne pouvait envisager de ne pas se protéger, quelles que soient les circonstances, même avec moi. Cela me froissait et me frustrait, bien sûr, mais j'ai fini par respecter sa position. 

 

Dans ce contexte, parallèlement, la question du préservatif s'est insinuée avec mon amant "Y". Nous nous rencontrions régulièrement depuis près d'un an et des contacts plus intimes pouvaient nous tenter. Mais je suis convaincue que le préservatif empêche tout autant la transmission de maladies que les débordements émotionnels et j'étais plutôt hésitante. Ce n'était pas pour moi que je craignais ces débordements, car les choses étaient claires dans ma tête, mais je les craignais pour lui. Je craignais que nos rencontres évoluent, qu'elles perdent cette magie des moments rares. Nous avons finalement tenté l'option et la magie s'est prolongée, avec du plaisir en plus. Le contact de l'éjaculation m'est égal, autant qu'à lui. Mais nous nous sommes mis à savourer les multiples possiblités de cette libre intimité préalable. Le plaisir, pour moi, de mouiller sur un sexe de chair et non de latex. Le plaisir, pour lui, d'éprouver son pouvoir d'amant formidable à travers toutes les  variations de mon humidité. Et tant d'autres plaisirs...

Du point de vue sanitaire, avec "Y", je savais que le risque était extrêmement faible, mais pas nul. Je l'assumais. De mon côté, le préservatif resterait de mise avec tous mes autres partenaires, y compris "X". 

 

"X" connaissait très bien ma liaison avec "Y" mais je ne lui ai pas parlé de cette nouveauté. Il me semblait que, du fait de ses positions, cette question lui était étrangère comme elle l'était à notre couple. Et les mois ont passé.

Un jour, un peu par hasard, au cours d'une conversation, j'ai indiqué à "X" ce qui se passait avec "Y".

Il l'a très mal pris, portant la charge avec des arguments d'ordre sanitaire. Mais j'ai bien senti que ses arguments n'étaient que la rationalisation d'autre chose. 

"X" était choqué que "Y" m'accorde une confiance que lui-même n'était pas en mesure de m'accorder. Il était blessé que je m'accorde une liberté qu'il ne m'accordait pas.

La tension était telle que, quelques heures après, lors d'un banal différend qui nous aurait en temps normal opposés peu de temps et nous aurait ensuite prêté à rire, il est parti en claquant la porte.

J'ai laissé la porte claquer. Et voilà.

   

Quelques mois plus tard, "X" et moi nous sommes retrouvés, avec une envie partagée. Mais il s'était installé une distance. Il se comportait régulièrement avec la dureté d'un homme qui veut d'autant plus s'affirmer qu'il a perdu la maîtrise de la situation. 

 

Ce rapprochement n'a pas duré.

Il y a eu le moment où la question a été formulée : "Est-ce que tu trouves normal que lorsqu'on a des sentiments pour quelqu'un, on s'amuse sans préservatif avec un autre?"

Bien sûr, puisque que le "quelqu'un" me le refusait, puisque je ne le mettais pas en danger, et puisque cela ne modifiait pas mes sentiments.

Mais ce n'était pas une question. Seulement une justification.

Et la porte a de nouveau claqué. 

 

Depuis, j'ai interrogé et je me suis interrogée sur le sens de cette affaire.

Il semble que la culture du préservatif évolue. D'instrument de contraception dans la seconde moitié du 20ème siècle, il est devenu instrument de survie dans les années 80 avec l'arrivée du VIH. Dans les deux cas, son retrait signifiait que les deux partenaires s'identifiaient comme partenaires exclusifs au sein d'un couple. Bien sûr on peut citer des exceptions : pères volages, barebackers... Mais la culture dominante impliquait que le retrait était un engagement pour l'avenir. Aujourd'hui, il y a de nombreux moyens de contraception et on ne meurt plus du SIDA sous nos lattitudes. Mais cette fonction d'outil de différenciation qualitative des relations demeure en prenant une dimension symbolique très forte : "Toi, avec qui je n'utilise pas de préservatif, tu es plus important / importante que toi, avec qui j'en utilise."

On était en plein dans le courant de l'Histoire mais je ne l'avais pas vraiment compris...

Il y a pourtant bien des couples libertins qui utilisent systématiquement le préservatif dans le couple pour se laisser des espaces de libre plaisir avec des amants devenant quelques temps plus privilégiés. Mais cela doit représenter une étape plus avancée de l'évolution...

 

Ah, Philippe ! Quoi dire, quand le dire, comment le dire, dans le contexte du pluripartenariat?

Aurais-je dû le dire avant, ou ne pas le dire du tout?

  

Dimanche 7 avril 7 07 /04 /Avr 11:35

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Commentaires

X est un gros jalouuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuuux! C'est tout. 

commentaire n° :1 posté par : Offy40 le: 07/04/2013 à 19h49

Ton avant dernier paragraphe sur l'étape plus avancée de l'évolution me laisse plus songeur. Evolution vers une société plus égoiste? Je me protège avec mon conjoint mais quand je m'occupe de moi je m'abandonne à l'absolu. 

Quelque part c'est "quitte à mourrir autant que ce soit dans les bras d'un autre"

 Je suis perdu Docteur Castels!

commentaire n° :2 posté par : offy40 le: 07/04/2013 à 19h57

Pas s'abandonner à l'absolu et à l'inconnu, mais seulement avoir des relations privilégiées hors couple avec partenariat sanitaire, sans danger. Dans cette logique, la complicité dans le couple libertin amène à accepter que son conjoint puisse avoir des amants privilégiés et conserver un jardin secret relatif : l'explication sur les modalités des relations avec les amants est alors facultative et ses modalités variables. Il faut tout de même que ce soit un couple très stable.

réponse de : Flo le: 07/04/2013 à 23h38

Exactement, or beaucoup de couples ne le sont pas. Y compris chez les libertins. Comme je l'ai dit c'est un milieu que je connais peu et que je n'ai fréquenté qu'occasionnellement. Mais comme cet univers se démocratise, beaucoup de mes connaissances se disent libertins. Et ce sont eux qui se séparent le plus. Et pas toujours dans l'élégance

Quant au préservatif, que pensez vous de la notion de deuxième depucelage. L'oter c'est comme offrir une deuxième fois sa virginité.

commentaire n° :3 posté par : offy40 le: 08/04/2013 à 06h43

Pour le retrait du préservatif, d'un point de vue émotionnel, il me smble qu'il y a effectivement quelque chose de cet ordre. Mais je me méfie beaucoup de l'usage qui peut être culturellement entretenu autour de la virginité, de sa perte, de son offrande. Donc j'aurais tendance à ne pas encourager ce qui va dans le sens de la sacralisation de certaines étapes du parcours sexuel.

réponse de : Flo le: 14/04/2013 à 22h12

Bonjour Gourmande!!!!!

tu m'as bien manquée pendant ces longs mois de silence!! J'adore la profondeur et l'honnêteté de tes 2 derniers articles! Continue stp!!

J'aimerais apporter ma petite pierre à l'édifice de la "protection sanitaire": il n'y a pas que le VIH!! on pense souvent à faire ce test la, voire les hépatites quand on décide d'oter l'emballage plastique. Bein moi, jme suis faite prendre (ah ah ah,oui je sais, c'est facile!!!) par le chlamydia..... un germe d'autant plus vicieux qu'il peut être invisible: c'est un partenaire qui m'a alertée parce que lui avait chopé une épididymite (avec quelques accusations bien sympathiques de sa part au passage, alors que, pour la petite histoire, c'est moi qui avait insisté pour que nous fassions un test avant de concrétiser la relation,parce que Monsieur ne savait pas faire l'amour avec capote......). Je ne suis pourtant pas dans la "population à risque",dixit le centre de dépistage puisque je dépasse les 25 ans. Et il a fallu que j'insiste lourdement pour que ma gyneco me fasse les prélèvements nécessaires, car elle connaissait mal ce germe, et comme je ne présentais aucun signe clinique, elle ne voyait pas la pertinence du test. J'ai bien sûr eu droit à quelques remontrances moralisatrices........ Vive la liberté sexuelle!!!!pfffffff Ca devient vraiment galère!!!! Retour à la fidélité!! lol

Soyez extrêmement prudents!!! malheureusement, faut se fier qu'à soi-même.

commentaire n° :4 posté par : Soleya le: 10/04/2013 à 11h25

Effectivement, les chlamidiae sont dangereux parce qu'ils attaquent les trompes et peuvent causer une péritonite et une septicémie chez des personnes de santé fragile. J'ai failli en mourir il y a 20 ans. Et oui... Et pourtant, à l'époque, j'étais sage. J'avais eu deux amoureux consécutifs à qui j'en ai parlé et qui eux ne présentaient aucun signe de contamination (ni symptôme, ni séropositivité aux chlamidiae). Je n'ai jamais donc su comment j'avais attrappé cela et je ne l'ai transmis à personne. C'est une maladie étrange, qui attaque certains et pas d'autres. Mais la question de l'âge est hors de propos. Les chlamidiae sont tellement courants que si on les attrappe, c'est généralement au début de sa sexualité. Mais on peut également en être victime après si on a une sexualité plus active en avançant en âge. Généralement, ils font leurs dégâts et s'en vont au bout de quelques années, mais ils peuvent faire de très gros dégâts (stérilité suite à infection des trompes) ou ne pas en faire du tout. En tous cas, il est regrettable que la France soit encore aussi négligente sur leur dépistage et même sur l'information à leur sujet. Regrettable aussi que la prévention soit largement laissée à l'initiative des associations dans les lieux de sexe. Regrettable encore que les lieux de sexe hétéros fassent comme si la prévention ne les concernait pas, alors que les lieux gays sont très vigilants à ce sujet et communiquent sur les différents risques.

réponse de : Flo le: 14/04/2013 à 22h51

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